Après la guerre des brevets voici la guerre de la communication

Vous connaissez, ou au moins avez entendu parler, de la guerre des brevets qui fait rage entre les constructeurs qui s'attaquent devant des tribunaux pour "vol de design", "violation du brevet B133C", "viol de la fonctionnalité X". Cette histoire de gros sous ayant pour but l'hégémonie d'un OS Mobile sur l'autre, est souvent rejointe par la guerre de communication.

Cette fois ci le feu au poudre a été déclenché par Madfinger Games qui a changé la politique commerciale du jeu Dead Trigger, le rendant gratuit au bout de quelques semaines où il était payant. Gratuit, oui au téléchargement, mais pour avancer il faudra toujours passer à la caisse. Le modèle commercial passait donc du payant au téléchargement et payant pour avancer, au payant plus tard pour avancer.
Soit un modèle fremium de plus en plus présent sur Android. Un modèle assez sympa en définitive qui permet de tester un jeu (comme avec les démos gratuites) et d'investir si affinité.

La raison donnée par  Madfinger Games à ce changement de politique tarifaire est le piratage sur Android. Dead Trigger avait été tellement "piraté" qu'ils ont préféré opter pour la << solution radicale de la gratuité >>. Un coup de comm' réussi pour l'éditeur et leur FPS, puisqu'au final  :

- Rien n'est gratuit, on continue toujours de payer pour avancer dans les niveaux. L'éditeur s'assure donc la diffusion plus efficace d'un jeu payant. On se demande même pourquoi le simple téléchargement du jeu n'était pas gratuit.
A partir du moment où il faut payer pour avancer, il est dans l'intérêt de l'éditeur de proposer son application gratuitement. Là c'était un peu comme si non seulement je faisais payer mes lecteurs pour accéder au site, mais qu'en plus je leur demandais de payer pour lire la suite des articles et qu'ensuite je rejette la faute du manque de lecteurs sur le piratage informatique. Un peu gros non ?

- La presse non spécialisée ne rate jamais une occasion de taper sur le piratage dans son ensemble (hadopi, loppsi etc..) et se délecte particulièrement lorsqu'il s'agit de ce gros marronnier qu'est "Android et le piratage". Madfingers Games a visé juste (pas trop dur non plus, hein).

Cette affaire a rapidement fait le tour du Web, "Android trop piraté", "Android facilement piratable" avons-nous pu lire. Le problème est que ces gros titres ont été repris par la presse non spécialisée qui a vu un opportunité d'article facile et racoleur.

Ça fait de la pap, coco !

Une occasion supplémentaire pour discréditer Android qui fait souvent l'objet d'attaques sur ses faiblesses de sécurisation, son market nid de virus et de spywares. Seulement cette Presse non spécialisée  est  lue en grande partie par les non technophiles, qui prendra facilement pour argent comptant ce qu'ils lisent.

Attends, c'est 03com.fr qui l'a dit !

Donc ces temps-ci c'est Android qui est au centre des attaques faciles, comme l'a été Apple il y a peu après la découverte d'un virus  par un employé de Microsoft. On assiste en fait à des cycles, une fois on tape sur iOS, une fois on tape sur Android et ainsi de suite, jusqu'à épuisement des journalistes.

Cette guerre de la com' fait passer Android pour une véritable passoire où l'on pourrait faire tout et n'importe quoi (j'ai même vu un blog, fraîchement débarqué sur la toile, expliquer très sérieusement que le Samsung Galaxy S3 pouvait exploser grâce à une application déclenchée à distance..). Le "laxisme" de Google sur le Play Store est aussi mis en avant, ce qui met Android en position de faiblesse pour le commun des mortels.

Android est ouvert, trop ouvert pour la presse non spécialisée qui s'est jetée sur la brèche ouverte par  Madfinger Games, après s'être emparé de l'affaire des virus  d'Apple et de la faille des SMS de Windows Phone. Pap affamée n'a point d'oreille.

Sans chercher à comprendre, à analyser, délivrant une information brute de sensations (plus c'est gros, plus ça passe) qui marque l'esprit de leurs lecteurs leur donnant une vision néfaste, dangereuse et faussée de smartphone, qui pourraient tout à fait leur convenir.

iOs, Android et WindowsPhone ont chacun leurs forces et leurs faiblesses. Je reconnais des qualités à iOs et j'ai même un blog très fourni sur WindowsPhone. Mais il est inutile de recourir à de telles caricatures pour faire la critique de l'un ou l'autre des OS. Laissons la surenchère de sensationnel à l'audiovisuel et sachons prouver, argumenter et défendre nos opinions factuellement. Nous avons tout le temps et l'espace pour le faire.

N'oublions pas que nos smartphones, tous OS confondus, sont des ordinateurs de poche connectés à Internet et que par cette simple connexion ils sont tous exposés à des risques, exactement comme pour des ordinateurs sous Windows, Linux ou Mac. OS qui sont tout autant ouverts qu'Android où l'on peut encore plus facilement installer n'importe quoi.

Attraper un virus sur PC est devenu une possibilité contre laquelle on se défend, sur smartphone c'est assimilé à un aveu d'incompétence de la part du fabriquant, alors que le niveau de risque est bien supérieur sur un PC.

La sécurité a toujours été une affaire d'éducation de l'utilisateur bien plus qu'une histoire d'OS. Les règles sont simples et évidentes. Il suffit de se dire qu'un malin arrivera toujours à pénétrer votre terminal (virus ou simple vol) pour ne pas vouloir y stocker des données essentielles.

De plus dans le mode des OS Mobiles quand vous installez une application, vous pouvez savoir quels droits cette application s'octroie, si ces droits vous semblent trop intrusifs, ne l'installez pas tout simplement.

Ici les autorisations demandées par Plume un client twitter reconnu sur Android.

Ici les autorisations demandées par Mehdoh un client twitter reconnu sur Windows Phone.

Evitons de devenir les pions d'une guerre de communication qui nous dépasse et ne nous fera pas devenir plus pauvre ou plus riches. Au contraire même, rentrer dans cette surenchère malsaine c'est prendre le risque de perdre toute crédibilité. Plus pauvre à moyen terme donc.

L'OS Mobile parfait n'existe pas, et puis comment serait-il ? Totalement fermé et verrouillé il deviendrait vite ennuyeux, totalement ouvert, il serait à réserver à un public technophile.  Tout ne sera donc qu'une histoire de compromis et d'équilibre.

Et ne rentrons non plus dans le jeu d'action/réaction qui cycliquement voit la presse généraliste s'en prendre à tel ou tel OS Mobile pour ensuite taper sur son concurrent.

Si je veux un avis sur la dernière Renault, je n'irais pas chercher l'information sur un site d'informations généralistes, traitant de la même manière recettes de cuisines et guerre au proche-orient, si connu soit-il, mais sur des blogs spécialisés qui auront des avis argumentés et éclairés et qui n'auront pas succombé à la facilité de dénigrer telle ou telle marque parce que

Ça fait de la pap coco !

Même dans la presse spécialisée, pourtant bien scindée en pro Android, pro Apple et pro Windows Phone, les réactions sont plus tempérées. Car non seulement chacun connait parfaitement les forces et faiblesses de son OS préféré, mais vous pouvez en plus compter sur les commentaires des lecteurs pour remettre tout ça à sa place si jamais le rédacteur allait trop loin.


Daniel Bort
Spécialisé dans les gadgets informatiques, je cuisine également des plats exotiques à la maison pour équilibrer mon immersion constante dans les dernières technologies et les actualités du LLM.
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